Da “Il sapone”
di Francis Ponge
traduzione e nota di Andrea Inglese
[Questa traduzione inedita (Francis Ponge, Il Sapone, Gallimard, 1967, p. 60–63) è apparsa su RIEF: Revue Itaienne d’Etudes Françaises, nella rubrica Seuils Poétiques 8 | 2018 : L’Écrivain critique de lui-même]
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È necessario parlare degli avvenimenti o degli spettacoli per lo meno spiacevoli che abbiamo dovuto sopportare dal giorno della nostra nascita? Ne ho qualche scrupolo. Anche se, a dire il vero, penso che in nessuna epoca ve ne siano potuti essere di più spaventosi, di più intollerabili per la sensibilità.
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(Sviluppare un poco.)
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Ma forse, riflettendoci bene, tutto ciò non è più grave di una semplice malattia – o del mero sentimento della condizione umana. Forse soltanto più spettacolare! Non sarò io a decidere. Rimane il fatto che la società – e ogni individuo – sono apparsi come inorriditi, travolti dallo smarrimento e dalla disperazione. E si è visto che l’autocontrollo, il sangue freddo, la pazienza e l’equanimità da soli non bastavano a raddrizzare i caratteri e a riconfortare gli animi.
Al tempo stesso, oggigiorno, i sentimenti di responsabilità e di colpevolezza umani si sono trovati – a torto o a ragione – sviluppatissimi nelle persone. E a torto o a ragione trovo questo molto ammirevole e molto patetico.
Ne consegue una disperazione morale, un rimorso e una risolutezza (seguiti da disillusioni, ecc.) altrettanto intollerabili.
A tal punto che, per la mentalità moderna, le lezioni dei saggi dell’antichità sono apparse inadeguate e, a essere precisi, inapplicabili. In che modo un uomo sconvolto da tali sentimenti avrebbe potuto accontentarsi dei consigli di Socrate, Aristotele, Montaigne o di Pascal, Voltaire, Vauvenargues? Mi rendo conto che molte persone vi hanno cercato rifugio. Temo che sia avvenuto a detrimento di una certa integrità.
Per quanto mi riguarda, non mi azzarderei quindi di predicare agli uomini il ripiegamento individualistico su di sé e la ricerca della tranquillità come unico bene desiderabile, ecc. Avrei davvero scrupoli a farlo, specialmente perché credo di poter essere letto da persone di una classe povera, che ritengo debba elevarsi prima di tutto, con grandi sforzi e coraggio, a una migliore condizione materiale. E ritengo ugualmente che queste persone e queste classi, avendo avuto la fortuna di trovare in tempi recenti una dottrina che le esalti e un partito che le guidi verso la vittoria, avrebbero davvero torto di rinunciarvi, per perseguire non so quali antiche teorie di rassegnazione e stoicismo, che evidentemente avvantaggiano i loro sfruttatori.
E quanto a questi sfruttatori, come potrebbero essere amati da un artista che, vedendoli talmente insensibili al bene e alle qualità del gusto, della delicatezza e dello spirito, finisce per rimpiangere i loro predecessori (aristocratici) nell’opera di sfruttamento dell’umanità? Come non augurarsi la loro disfatta e la loro sostituzione con questa classe povera che detiene probabilmente risorse di fervore e di purezza capaci di generare il bello e il delicato, che sono i beni supremi da me desiderati per gli uomini.
Quindi non distoglierei nessuno dal dovere di agire e di ribellarsi. Al contrario, considerando che ogni uomo (fosse pure un artista) deve dedicare una parte almeno della sua attività all’azione civile, quando la situazione diverrà pregnante (e non smette, per così dire, di esserlo) sarò schierato con la parte in questione.
Comunque sia, non sarebbe onesto da parte mia (e d’altro canto non servirebbe a nulla, finendo comunque per trapelare) rinunciare minimamente ai valori che una formazione, borghese senza dubbio, ma in definitiva anche umana, mi ha portato a considerare una volta per tutte come i più degni di essere perseguiti e difesi (a tal punto che se desidero la rivoluzione, – o questo movimento storico che alla fine condurrà al potere la classe attualmente sfruttata – è nella speranza che il più gran numero di persone – e al limite tutti gli esseri umani – siano messi un giorno nella condizione di poter perseguire questi valori, di consacrarli e goderne). Quali sono questi valori? L’ho appena detto: la bellezza e la delicatezza.
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Note du traducteur
Aujourd’hui les savons n’existent presque plus. C’est par cette phrase que je suis obligé de commencer. Par ce hors-sujet qui n’a rien à voir avec mes (prétendus) propos de traducteur. Le savon est en voie de disparition parce que un étrange esprit du « beau » et du « délicat » a tellement gagné notre monde que le savon véritable, le savon de hier, celui de Ponge au moins, n’a pas été considéré suffisamment beau et délicat par quelques concepteurs d’entreprise. Il se consommait d’une manière très inesthétique le vieux savon, il se lézardait, il devenait un peu gris vers la fin, un peu trop acéré, il se désintégrait en débris. Donc aujourd’hui on est passé à un savon plus « spirituel » : on est dans une société liquide qui préfère un savon liquide. Il n’y pas d’agonie, pas de consomption, pas de restes difficilement utilisables. Le savon est là jusqu’à la dernière goutte. Et quand il n’y en a plus, la boite en plastique transparente est vide, propre. À part ce constat, je ne crois pas pouvoir dire grande chose à propos de mes choix et de mes difficultés de traduction.
J’ai choisi un passage réflexif, qui appartient plutôt au registre de l’essai. Il n’y a pas question ici de définitions ou descriptions, mais d’idées – ces choses que l’auteur considère normalement avec un certain dégout. Le thème traité – l’extrait date de juillet 1946 – est de nos jours largement inactuel : le rapport que la classe « misérable », comme l’appelle Ponge, entretien avec la beauté. La notion d’engagement aussi est abordée dans ces lignes, mais à travers une formulation qui s’écarte du langage militant (sartrien) de l’époque. Quand il réfléchit, Ponge est très économe. Sa méfiance des opinions et des idées courantes le pousse à chercher toujours les termes – donc les concepts – moins à la mode, moins redevables des doctrines du jour. Cela ne l’empêche pas de prendre position pour le mouvement ouvrier et la lutte anticapitaliste.
Le traducteur se trouve face au défi de tirer parti de l’inactualité de Ponge, tout en cherchant une communication claire et directe avec, non pas évidemment l’actualité, mais le temps présent. Pour ma part, ce défi s’est concrétisé dans la difficulté de traduire l’adjectif « misérable » que Ponge associe à « classe ». « Misérabile » c’est un terme qui a une connotation définitivement négative. Quant au terme « indigente », il appartient au langage de la politique, de la bureaucratie ou, au mieux, d’une sociologie qui regarde avec distance scientifique les phénomènes. Ponge n’a pas expressément parlé de classe prolétaire. Il a fait un pas en arrière par rapport au vocabulaire de l’engagement et du marxisme de l’après-guerre. J’ai choisi donc l’adjectif « povera », parce que la « pauvreté » c’est un mot qui précède le marxisme et qui en sera toujours l’héritier.
Il fallait aussi résoudre l’écart bizarre entre des « spectacles pour le moins désagréables » – il y a là de l’ironie, un euphémisme volontaire – et ces mêmes spectacles qui, quelque lignes après, sont considérés comme les « plus effroyables », les « plus éprouvants pour la sensibilité ». Ponge parle de la guerre. J’ai donc choisi de radicaliser l’écart sémantique entre les adjectifs et de traduire « éprouvants » par « intollerabili ». (D’autre part, toute affection « intolérable » est paradoxalement éprouvée par l’esprit. Comme la torture l’enseigne, ou toute grande souffrance morale, on ne désigne pas à travers le concept d’« intolérable » quelque chose que notre sensibilité ne pourra pas supporter, mais la passivité presque infinie de notre sensibilité face à quelque chose qui l’offense.)
Les individus sont « affolés » par les spectacles de la guerre. Mais la guerre n’est jamais liée à la simple peur. L’effroi s’accompagne d’une répulsion spécifique : on est dans le domaine de l’horrible. J’ai donc traduit : « inorriditi ».
Sous la plume d’un matérialiste athée « esprits » et « âmes » ne peuvent devenir in italien que « caratteri » et « animi », à savoir deux termes synonymes comme dans le texte d’origine.
Je n’ai osé rien inventer pour apprivoiser le péremptoire et un peu énigmatique « prégnante ». Mais on voit bien l’importance que les adjectifs peuvent avoir chez Ponge. Ici il y a comme un renversement de hiérarchie : dans « situation prégnante », c’est l’adjectif qui fait tout.
In fine. Je ne peux pas être persuadé par « il bello » e il « delicato ». Le masculin refroidit énormément la portée de ces deux termes. Je veux bien reconnaitre le double jeu opéré par Ponge : évoquer avec désinvolture des termes qu’il faudrait longuement mettre à jour, expliciter, redécouvrir. Lui il les utilise comme un traditionnaliste, mais il leur soustrait tout emphase. Néanmoins, il y a une tension à laquelle je ne pouvais pas renoncer entre la dimension abstraite produit en italien par le suffixe « ezza » et la dimension sensuelle des termes féminins (et longues) « bellezza » et « délicatezza ». Je n’ai pas pu les utiliser lors de la première occurrence, parce qu’il y avait déjà « purezza », et trois mots à la suite avec les mêmes suffixes auraient été musicalement insupportables. Donc j’ai renoncé à la cohérence et à la fidélité. Mais si vraiment il faut se battre pour quelque chose, je préfère prendre parti pour « la bellezza » et la « delicatezza » – termes sans doute prétentieux – plutôt que pour « il bello » et « delicato » – plus modestes et sobres, mais pas très entraînants.
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Immagine: Andrea Inglese, Pagine, 2017.